Isaac Bazié

La Traversée nocturne

Burkina Faso   2004

Genre de texte
roman

Contexte
Ce soir où l’initiation continue dans la forêt, Baki, devant sa maison et allongé sur sa chaise longue, médite. Surpris par le sommeil, il fait ce rêve.

Texte témoin
La Traversée nocturne, Ottawa, Malaïka, 2004, p. 120-21.




Le deuxième rêve de Baki

Le temps presse

À cette heure de l’indécision, pendant ce deuxième crépuscule de l’initiation, Baki resta allongé sur sa longue chaise. Il sombra dans un léger sommeil. Qu’est-ce qu’un sommeil sans rêve, demande-t-on souvent à Katena? Baki fit un songe. Inquiétant. Dans ce songe, il vit sa défunte femme, la mère de Vourma, entrant dans la concession. Elle tenait leur premier fils par la main. Le grand-frère de Vourma, mort il y avait très longtemps. Les deux êtres avançaient d’un pas très lent vers Baki. Celui-ci attendait. Lorsqu’ils furent assez proches de lui pour se faire entendre, ce fut le bébé marchant qui parla à l’homme, pas la femme. Et, dans un mouvement uniforme de bras tendus vers le vieux Baki, geste ferme, invitation irréfutable, l’enfant dit à son père :
— Nous sommes venus te chercher. Le temps presse.
C’est alors que la mère ouvrit la bouche. Le temps et les mots s’y confondirent:
— Encore une nuit et un jour. Et ce sera fini.
Le vieux Baki sursauta. Quelque chose avait bougé dans les larges feuilles du papayer planté à l’entrée de la concession. Il ne se donna même pas la peine d’aller voir. À quoi bon chercher l’insaisissable? L’Heure du silence s’était écoulée.

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