Jeanne-Marie Guyon

La vie de Mme Guyon écrite par elle-même

France   1700

Genre de texte

Notes
Jeanne-Marie Guyon (1648-1717) a été une des figures principales du quiétisme en France.

Texte original

Texte témoin
La vie de Madame J.M.B. de La Mothe-Guyon, écrite par elle-même..., qui contient toutes les expériences de la vie intérieure, depuis ses commencements jusqu'à la plus haute consommation, avec toutes les directions relatives. (Cet ouvrage en 3 volumes est en fait une compilation de divers écrits). Paris, Les libraires associés, 1791, tome I, chap. 29, p. 279.




Les songes viennent de Dieu

Porter la croix

8. On s’étonnera sans doute que faisant si peu de cas de tout l’extraordinaire, je rapporte des songes. Je le fais pour deux raisons : la première, par fidélité, ayant promis de ne rien omettre de ce qui me viendrait dans l’esprit : la seconde, parce que c’est la manière dont Dieu se sert & se communique aux âmes de foi pour leur donner des significations de l’avenir en choses qui les concerne, quoiqu’il y ait une manière de connaître d’une extrême pureté, dont il les gratifie, & que j’expliquerai ailleurs. Ces songes mystérieux se trouvent en quantité d’endroits de l’Écriture sainte. Ils ont des propriétés singulières, comme, de laisser une certitude qu’ils sont mystérieux, & qu’ils auront leur effet en leur temps ; de ne s’effacer presque jamais de la mémoire quoique l’on oublie tous les autres, & de redoubler la certitude de leur vérité toutes les fois que l’on y pense ou que l’on en parle: de plus, ils produisent une certaine onction au réveil pour la plupart.

9. Une religieuse des Bénédictines, qui est une très sainte fille, vit dans leur réfectoire Notre Seigneur attaché à la croix, & la Sainte Vierge auprès de lui, qui paraissaient dans une grande peine. Ils faisaient des mouvements qui semblaient marquer leur souffrance, & le désir qu’ils avoient de trouver quelqu’un qui voulût les partager. Elle courut en avertir la Supérieure, qui dit qu’elle avait à faire, & ne pouvait y aller. Elle voyait qu’elle s’amusait à des fleurs & à des arbres. Ne trouvant personne qui voulût y aller, elle était fort en peine, lorsqu’elle me rencontra & me le dit. J’y courus aussitôt, & Notre Seigneur en parut très-Content; il me reçut & m’embrassa comme pour m’associer à ses souffrances; après quoi il n’eut plus de peine. Lorsqu’elle me dit cela, je ne lui dis chose aucune de mes desseins. Je compris dans ce moment que c’était des desseins de croix, d’opprobres, & d’ignominies, pour me faire porter JESUS CRUCIFIÉ.

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