Julien Green

Journal

France   1942

Genre de texte
Journal intime

Contexte
Le rêve est raconté à l’entrée datée du 16 février 1942.

Notes
Robert de Saint-Jean.

Texte témoin
Journal, Paris, Plon, 1969, vol. 1: 1928-1949, p. 480-481.




Le Pont Doré de Paris

Une gravure

La nuit dernière, rêvé de Paris. Je me voyais dans la rue Saint-Honoré avec Robert et je lui demandais s’il n’y avait pas là, autrefois, un grand pont qui enjambait les maisons. «C’est le Pont Doré dont tu me parles», disait Robert, «tu sais bien qu’on l’a démoli en 1918.» Et il m’a montré une gravure où l’on voyait le Pont Doré, sorte de jetée perchée sur de minces colonnes et ornée de victoires aux ailes perpendiculaires dans le style du Directoire. Alors je me suis rappelé avec une précision hallucinante mes promenades sur le Pont Doré, vers la fin des beaux jours d’été, avec mes parents. Le Pont sautait par-dessus les grands immeubles de la rue de Rivoli et se terminait dans le ciel, à la hauteur de la Seine. Il était enivrant de s’y tenir et de regarder, le cœur battant de plaisir, les toits, les cheminées, les tours et les dômes de Paris.

Page d'accueil

- +