Jules Sandeau

Sacs et parchemins

France   1851

Genre de texte
roman

Contexte
Le rêve se situe au chapitre xv du livre qui en compte xxi.

Au lendemain de la Révolution, l’hôtel de M. Levrault, un bourgeois, est touché par l’abolition des titres et de la pairie. Il héberge Solon, un ouvrier blessé, et ses amis dans son établissement. Solon confie à M. Levrault ne rester chez lui que par nécessité puisqu’il hait les gens riches comme lui. Ce même soir, M. Levrault fait un rêve.

Notes
Laure est la fille de M. Levrault, Gaston son gendre et la marquise la mère de son gendre. L’arbre de la liberté a été planté par les amis de Solon dans la cour de l’hôtel; il est orné de rubans, surmonté d’un drapeau tricolore et d’un bonnet rouge.

Texte témoin
Paris, M. Lévy, 1855, p. 48.




Le rêve d’un bourgeois

Le cauchemar de la Révolution

Une fois seul, il repassa dans sa mémoire toutes les impressions de la journée. Solon, qui devait le protéger, le sauver, l'effrayait de plus en plus par l'amertume de son langage. Un rêve affreux vint mettre le comble aux angoisses de M Levrault. Une bande furieuse envahissait l’hôtel, la torche à la main, et Solon, au lieu de repousser les assaillants, les guidait lui-même à travers les appartements, les animait au pillage, prenait sa part du butin, et mettait le feu aux quatre coins de la maison. Laure et la marquise, échevelées, franchissaient les escaliers en flamme; Gaston les précédait, armé jusqu’aux dents. Tout à coup l’arbre de la liberté planté au milieu de la cour se transformait en un gibet de proportions gigantesques; le drapeau qui le couronnait se détachait et laissait voir Solon armé d’une corde. Déjà la marquise, Laure et Gaston étaient lancés dans l’éternité, et les pillards dansaient autour de la potence comme une ronde de cannibales. Le tour de M Levrault était venu. Solon lui passait au cou le noeud coulant. À ce moment suprême, M Levrault se réveilla en sursaut, baigné d’une sueur glacée.

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