Une église lui tombe dessus

Une maison penchait, là-bas près du Rhône. Jacques apparaissait sur la route en sifflant un air très gai, il était joli comme un enfant avec ses joues roses et ses cheveux clairs ondulés; il s’approchait de la maison qui allait tomber, tout à fait insouciant et cependant il la montrait du doigt. Mais alors je découvrais que Taddeo et tous ses amis se tenaient de l’autre côté de la maison, et arc-boutés aux falaises du Rhône, poussaient afin que la maison s’écroulât sur Jacques juste au moment voulu. Je comprenais le plan, j’appliquais mon dos à la façade et j’étais douée d’une force d’hercule, j’arrêtais tout. J’avais si mal à la tête ce jour-là que Jacques me disait : va-t’en derrière la maison avec eux. Je refusais, mais il me forçait en me regardant d’une certaine manière que nous connaissions seulement nous deux : et subitement la maison se montrait dans sa vraie nature, c’était l’église d’Ongero. Alors il n’y avait plus rien à faire. Jacques commandait. Taddeo poussait, avec sa bande, et j’ajoutais ma force immense qui décidait toujours de tout. L’église tombait sur Jacques, on voyait Jacques les bras au ciel et disparaissant, et son regard si malheureux entre deux pierres dans le tourbillon; ensuite subitement la scène changeait, j’étais sur la mer comme à Odessa quand j’étais petite, et je nageais.