(Isidore Ducasse dit Le comte de) Lautréamont

Les chants de Maldoror

France   1869

Genre de texte
poésie

Contexte
Le poème se situe dans la première moitié du deuxième chant du recueil qui en compte six.

Un adolescent hermaphrodite s’est endormi en pleurs sur le gazon. Il est malheureux, car, malgré sa générosité et son intelligence, il est perçu comme un monstre et un fou. Il se sent rejeté et seul.

Texte témoin
Œuvres complètes, Paris, Corti, 1953, p. 180.




Le rêve d’un hermaphrodite

Vol sur un nuage pourpre

Il rêve qu’il est heureux; que sa nature corporelle a changé; ou que, du moins, il s’est envolé sur un nuage pourpre, vers une autre sphère, habitée par des êtres de même nature que lui. Hélas! Que son illusion se prolonge jusqu’au réveil de l’aurore! Il rêve que les fleurs dansent autour de lui en rond, comme d’immenses guirlandes folles, et l’imprègnent de leurs parfums suaves, pendant qu’il chante un hymne d’amour entre les bras d’un être humain d’une beauté magique. Mais ce n’est qu’une vapeur crépusculaire que ses bras entrelacent; et, quand il se réveillera, ses bras ne l’entrelaceront plus. Ne te réveille pas, hermaphrodite; ne te réveille pas encore, je t’en supplie. Pourquoi ne veux-tu pas me croire? Dors... dors toujours. Que ta poitrine se soulève en poursuivant l'espoir chimérique du bonheur, je te le permets; mais n'ouvre pas tes yeux. Ah! N'ouvre pas tes yeux! Je veux te quitter ainsi, pour ne pas être témoin de ton réveil.

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