Charles Nodier

La Fée aux miettes

France   1831

Genre de texte
roman

Contexte
Le rêve se situe au chapitre IX intitulé « comment Michel pêcha une fée, et comment il se fiança » (le livre compte XXVI chapitres).

Michel, un jeune charpentier obsédé par la « mandragore qui chante », se lie d'amitié avec la Fée aux miettes, une vieille mendiante. Le jeune homme l'aide à se rendre chez elle en Écosse. Il fait ce rêve alors qu'il vient de sauver la Fée aux miettes, de retour à Granville, quand elle s'est enlisée dans un golfe de sable. Peu après, il lui a promis de l'épouser.

Texte témoin
Paris, Nilsson, 1930, pages 94-95. BNF, Gallica.




Du rêve à la réalité

A la pêche aux princesses

J’arrivai bien tard à Granville, et je dormis aussi cette nuit-là plus longtemps que d’habitude, plongé dans un rêve singulier qui se reproduisait sans cesse, et qui consistait à pêcher dans le sable une multitude de jeunes princesses, éblouissantes de charmes et de parure, et à les voir danser en rond autour de moi, chantant, sur l’air de la mandragore, des paroles d’une langue inconnue, mais que je trouvais harmonieuse et divine, quoiqu’il me semblât l’entendre par un autre sens que celui de l’ouïe, et l’expliquer par une autre faculté que celle de la mémoire. Ces princesses ne se lassaient donc pas de chanter, de danser, et de déployer devant moi mille séductions ravissantes qui me gagnaient le cœur, quand je fus tout de bon réveillé par mes camarades les caboteurs, qui répétaient le même refrain sous ma fenêtre, à gorge déployée :

c’est moi, c’est moi, c’est moi!
je suis la mandragore,
la fille des beaux jours qui s’éveille à l’aurore,
et qui chante pour toi!

je compris qu’ils étaient sur le point de partir et qu’ennuyés de m’attendre au port, ils s’étaient décidés à venir rompre mon sommeil, pour m’emmener avec eux.

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