Jean-Charles Harvey

Les demi-civilisés

Québec   1934

Genre de texte
roman

Contexte
Ce rêve se trouve au début du roman.

Enfant, Max Hubert se croit obligé d’entrer dans le sacerdoce. Des doutes surgissent cependant dans son esprit, notamment à la suite d’entretiens avec le vieux Maxime, pêcheur de son métier, qui a perdu la foi. Ces doutes le hantent jusque dans ses rêves.

Texte témoin
Les demi-civilisés, Montréal, Éditions de l'homme, 1966, p. 19.

Édition originale
Les demi-civilisés, Montréal, Éditions du Totem, 1934, p. 15-16.

Édition critique
Les Demi-Civilisés de Jean-Charles Harvey. Édition critique par Guildo Rousseau, Montréal, PUM, coll. «BNM», 1988, 299 p.




1er rêve de Max Hubert

L’ostensoir

Certains soirs, quand je m’endormais, mille fantômes peuplaient mon imagination et prenaient les apparences de la réalité. De grandes processions, bannières en tête, en longues files de chantres et d’enfants de choeur, défilaient au rythme des psaumes, précédant un immense ostensoir d’or tenu par un prêtre tout jeune. Ce prêtre finissait par s’identifier avec moi-même, et je sentais si lourd, le fardeau que je portais, que je craignais de le lâcher dans la poussière du chemin. A mesure qu’on avançait, la tentation devenait plus forte, plus impérieuse. Alors paraissait près de moi le sourire du père Maxime : « Mais jette-le donc par terre, imbécile! » Mes mains s’ouvraient, l’ostensoir tombait, et, tout à coup, les enfants de choeur en surplis blancs se changeaient en démons à surplis rouges. Les chantres se mettaient à danser une ronde infernale, à hurler des imprécations sacrilèges. Un diable, plus grand que tous les autres, s’emparait de l’ostensoir et le jetait au loin avec un éclat de rire. Je m’éveillais, poussant un cri de terreur.

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