Marie-Claire Blais
Les nuits de l’Underground Genre de texte Contexte Geneviève, une jeune sculptrice, se remémore des moments de sa relation amoureuse avec Lali, une femme distante et insaisissable qui hante toujours ses pensées. Lali a connu la guerre dans sa jeunesse, mais la narratrice ne connaît ni ses origines ni sa religion. Notes Édition originale
roman
Ce rêve se situe vers la fin du premier chapitre.
Le massacre des saints Innocents : Évangile selon Mathieu (II, 16). Sous les ordres du roi Hérode, des enfants juifs sont mis à morts. Cet évènement est souligné le 28 décembre.
Les nuits de l’Underground, Montréal, Stanké, 1978, p. 132-133..
Les portes peintes de sang
Il y avait aussi tous les rêves, tous les rêves auxquels Lali, sans le savoir, avait été mêlée, et dans l’un d’eux, Geneviève s’éveillait un matin aux côtés de Lali, dans une ville qui, dans le rêve, évoquait Jérusalem, elles s’éveillaient sous des voûtes de pierre qui laissaient entrevoir un ciel si bleu qu’une telle douceur, si près de soi, avait un aspect inquiétant : «Look, avait dit Lali, it is so beautiful here, that I am afraid!» En marchant dans la ville qui semblait abandonnée, elles avaient rencontré des soldats d’une autre époque qui peignaient de signaux rouges les portes de chacune de ces maisons en apparence inhabitées : «It is so quiet, avait dit Lali, I am afraid, demandons-leur pourquoi tout ce red peint, it is too quiet, where is the people?» L’un des soldats dit que c’était une coutume dans la ville de peindre ainsi chaque année les portes des maisons : «But, why? demandait Lali, why this paint is the colour of the blood?» Et l’homme avait répondu : «You see, Lali, it is blood, we paint with your blood each year pour célébrer le massacre des saints Innocents.» Geneviève n’avait-elle pas été secouée hors de son rêve, cette nuit-là , par Lali courant à la fenêtre [ ...]