Margaret Atwood

The Blind Assassin

Canada   2000

Contexte
Ce rêve se trouve dans la partie IX du roman. Quelques pages auparavant, au début du chapitre précédent, Iris était allée voir son médecin pour se plaindre de ne pas pouvoir dormir à cause de ses cauchemars.

Iris est horrifiée de voir sa petite sœur comme une vieille femme car, en fait, celle-ci est morte dans un accident de voiture à l’âge de 25 ans. À son réveil, Iris raconte un voyage à New York qu’elle avait fait avec son mari et Laura. À leur retour à Toronto, la famille avait visité la maison où les filles avaient passé leur enfance, Avalon. Celles-ci se sont souvenues du temps où leur père s’habillait en père Noël avec une guirlande de bougies sur la tête. Cela avait sérieusement effrayé la petite Laura.

Commentaires
Ces cauchemars traduisent le remords qu'éprouve Iris de n'avoir pas su protéger sa petite sœur Laura. Ayant entrepris de raconter l'histoire de son mariage raté et de la mort de Laura, son inconscient ramène à la surface des images horribles qui font avancer le récit. Elle est également torturée par le souvenir de Reenie, la bonne qui lui a servi de mère: «Reenie is back. She's none too pleased with me. Well, young lady. What do you have to say for yourself? What did you do to Laura? Don't you ever learn?» (p. 428)

Les raisins secs évoquent les gâteaux aux fruits, typiques de la tradition anglo-saxonne pour les fêtes de Noël.

Texte original

Texte témoin
Le Tueur aveugle. Traduit de l’anglais par Michèle Albaret-Maatsch. Paris : Robert Laffont, 2002, p. 426.

Édition originale
The Blind Assassin. Toronto : McClelland & Stewart, 2000, p. 380.




Rêve d’Iris (4)

Retour à l'enfance

La nuit dernière, j’ai pris une des pilules que le médecin m’a prescrites. Elle m’a aidée à dormir, c’est certain, mais là-dessus j’ai rêvé, rêve qui ne valait pas mieux que ceux que je fais sans médicaments.

J’étais sur le ponton d’Avalon, avec la glace brisée, verdâtre, de la rivière qui tintinnabulait tout autour comme des clochettes, mais je ne portais pas de manteau — juste une robe en coton imprimé couverte de papillons. Ainsi qu’un chapeau fait de fleurs en plastique aux couleurs criardes — rouge tomate, lilas hideux — que de minuscules ampoules éclairaient de l’intérieur.

Où est le mien? braillait Laura de la voix qu’elle avait à cinq ans. Je baissai les yeux vers elle, mais nous n’étions plus du tout des enfants. Laura était devenue vieille, comme moi; ses yeux étaient de petits raisins secs. Horrifiée, je me réveillai.

Il était trois heures du matin. J'ai attendu que mon cœur arrête de protester, puis me suis rendue en bas et me suis fait un lait chaud. J'aurais dû savoir qu'il ne fallait pas se fier à des pilules. On n'achète pas l'inconscience à aussi bon marché.

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