Théophile Gautier

Mademoiselle de Maupin

France   1836

Genre de texte
prose

Contexte
Le rêve se situe au chapitre IX du livre qui en compte XVI.

Dans une lettre, d’Albert confie à Sylvio, son ami d’enfance, qu’il est amoureux de Théodore, un jeune cavalier qui incarne pour lui la beauté parfaite et dont il pense qu’il est une femme. Il avoue ne pas se sentir à sa place dans la société et être devenu froid, indifférent et inhumain, ce que lui confirment ses rêves.

Texte témoin
Paris, Garnier-Flammarion, 1973, page 209.




Les rêves d’Albert 2

Des songes de pierre

Peu à peu ce qu’il y avait d’incorporel s’est dégagé et s’est dissipé, et il n’est resté au fond de moi qu’une épaisse couche de grossier limon. Le rêve est devenu un cauchemar et la chimère un succube; – le monde de l’âme a fermé ses portes d’ivoire devant moi : je ne comprends plus ce que je touche avec les mains; j'ai des songes de pierre; tout se condense et se durcit autour de moi, rien ne flotte, rien ne vacille, il n'y a pas d'air ni de souffle; la matière me presse, m'envahit et m’écrase; je suis comme un pèlerin qui se serait endormi un jour d’été les pieds dans l’eau et qui se réveillerait en hiver les jambes prises dans la glace.

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