William Wordsworth
Le Prélude Genre de texte Contexte Texte original Texte témoin
poème
Le Prélude est un récit plus ou moins autobiographique de la vie du poète et de sa formation artistique. Ce passage provient du livre X. Le poète est arrivé à Paris après les massacres de septembre, un événement qui l’a grandement affecté comme en témoignent ses rêves.
Le Prélude ou La Croissance de l’Esprit d’Un Poète. Paris: Éditions Aubier Montaigne, 1949, p.400-3. Traduit de l’anglais par Louis Cazamian.
Des tribunaux sans justice
Mélancoliques en ce temps, mon Ami, furent
Tout le jour mes pensées, et mes nuits misérables;
Durant des mois, des ans, après le dernier spasme
De ces atrocités, le moment du sommeil
Rarement vint chargé de ses dons naturels,
Car j’étais assailli d’affreuses visions :
Désespoir, tyrannie, et instruments de mort;
Innocentes victimes, ployant sous la crainte,
Sous des moments d’espoir, et des prières lasses,
Chacune en sa cellule, ou pour le sacrifice
Parquées en troupe, et luttant contre une gaieté
Artificielle, une parade d’insouciance,
Dans leurs prisons au sol tout arrosé de larmes.
Soudain changeait la scène, et la suite du rêve
M’enchaînait à de longs discours, où je tentais
De plaider, devant des tribunaux sans justice ;
Mon esprit confondu, et ma voix étranglée,
Dans la mortelle angoisse d’une trahison
Sentie en mon dernier refuge, ma propre âme.