Robertson Davies

The Manticore

Canada   1972

Genre de texte
roman

Contexte
Ce rêve se situe au chapitre 13 de la deuxième section du roman, à la fin de l’analyse du narrateur à la clinique jungienne de Zurich.

Le premier rêve dans ce passage réfère à un rêve que David a fait avant de commencer son analyse psychanalytique (fiche 810). Le deuxième rêve est nouveau.

Notes
Knopwood était un prêtre que fréquentait David lorsqu'il était adolescent et à qui il avait fait part de ses préoccupations, notamment sa relation avec Judy et sa première expérience sexuelle catastrophique.

Commentaires
Le Docteur von Haller explique à David que l’homme qu'il a vu dans son rêve n’est pas nécessairement son père biologique, mais représente plutôt un archétype de la paternité que David porte au fond de lui-même. En effet, dit-elle, un des principes premiers de l'analyse est que les personnages qui apparaissent dans les rêves sont des aspects du rêveur. L'analyste dit ensuite à David qu’il doit décider s’il veut continuer l'analyse et passer à la prochaine étape après les vacances de Noël ou s'il veut continuer seul. David sait maintenant, ajoute-t-elle, que «les rêves sont un matériau très spécial et qu'ils ne mentent pas».

Texte original

Texte témoin
Le lion avait un visage d’homme, trad. Claire Martin (revue par C.V.), Montréal : Tisseyre, 1978, p. 274-275.

The Manticore, Toronto : Penguin Books, 1996, p. 229-230.




Un archétype de la paternité

C’était mon père

— …Vos rêves… Nous avons étudié plusieurs douzaines de vos rêves et je pense que vous êtes convaincu, maintenant, qu’ils ne sont pas seulement des vapeurs incompréhensibles qui pénètrent dans votre tête pendant le sommeil. Souvenez-vous de ce rêve que vous aviez eu la nuit précédant notre premier rendez-vous. Cet endroit clos, interdit, où vous suscitiez tellement de respect et d'où vous partiez vers une région étrange, qu’était-ce ? La femme que vous avez rencontrée et qui parlait une langue inconnue, qui était-ce ? Ne me dites pas que c’était moi, vous ne m’aviez jamais vue et même si les rêves reflètent nos préoccupations profondes et qu'ils peuvent donc concerner l’avenir, ce n'est pas une seconde vue. Après quelque exploration, vous êtes parvenu au haut d’un escalier qui allait vers le bas et des gens du commun vous dissuadèrent de descendre. Et pourtant, vous sentiez qu’il y avait là un trésor. Vous devez décider maintenant si vous allez descendre l’escalier et trouver le trésor.

— Comment saurai-je si c’est un trésor ?

— Parce que l’autre de vos rêves récurrents, celui où vous êtes le petit prince dans une tour, vous désigne comme le gardien d’un trésor. Mais qui sont tous ces personnages terrifiants qui le menacent ? Nous allons certainement les rencontrer. Et pourquoi êtes-vous un prince ? Et un enfant ? Dites-moi, avez-vous rêvé la nuit dernière ?

— Oui. Un rêve tout à fait bizarre. Il me rappelait Knopwood parce que c'était un rêve de style biblique. J’ai rêvé que je me tenais dans une plaine et que je parlais avec mon père. Je savais que c’était mon père, même si son visage était détourné. Il se montrait très affectueux et simple dans ses manières, comme je ne pense pas l’avoir jamais connu pendant sa vie. Ce qu’il y a d’étrange, c’est que je ne pouvais pas voir son visage. Il portait un complet veston ordinaire. Soudain, il se retourna et s’élança dans les airs. Ce qui m’étonna, c’est qu’en montant il perdit son pantalon et que je vis son derrière nu.

— Et quelles sont vos associations?

— Bien, manifestement, c'est le passage de l'Exode où Dieu promet à Moïse qu'il le verra, mais qu'il ne doit pas voir son visage.

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